Indignité

Le MAC publie le témoignage d’une Consoeur qui a assisté à l’audience du 15 octobre dernier dans l’affaire Christiane Féral-Schuhl contre Président du MAC.

Bonne lecture Madame le Bâtonnier …   

***

Jamais je n’avais rencontré notre Confrère Bitton. 

Mais ses tribunes et ses victoires des derniers mois m’avaient alertée.

Jamais non plus je n’avais assisté à une audience disciplinaire de notre Ordre.

Je décidai donc le 15 octobre 2013 de juger par moi-même.

Environ une quarantaine de Confrères comme public, en robe ou non, assis aux places habituelles des membres du Conseil, autour de l’immense rectangleDe face, cinq de nos Confrères, à la place des juges. Sur le côté, un de nos Confrères, à la place du ‘procureur’. De dos, notre Confrère Bitton. Il est debout et s’exprime, encadré par deux Confrères assis, seuls à être à leur place d’Avocats.

J’arrive à temps pour entendre l’avocat-procureur, spécialisé en droit immobilier, ancien membre du Conseil de l’Ordre de Paris.

J’ignorais encore que je vivrais cette audience comme l’une de mes plus grandes indignations d’Avocat.

Rapidement, le ton fut donné : notre Confrère Bitton était condamné d’office. L’avocat-procureur était un procureur-bourreau et commençait par l’exécution.

Un ton et un amphigouri d’un autre âge. Mais surtout la condescendance, le mépris, la volonté d’humilier et, tout simplement, une véritable méchanceté.

Méfiez-vous jeunes Confrères : la bienveillance de l’aîné, élément de la Confraternité, c’est comme les antibiotiques, c’est pas automatique.

Rien ne fut épargné à notre Confrère Bitton :

– il n’était pas président du MAC, il usurpait sa fonction et avait même falsifié les statuts,

– ses combats ont été dénigrés (défendre la liberté d’expression pour un homme torturé,  » cela a une autre gueule  » que de la défendre en qualité d’Avocat, de président d’un syndicat d’Avocats, de membre du Conseil de l’Ordre, de membre du CNB),

– il subissait les poursuites de ses pairs mais c’était lui qui « cherchait querelle », cherchait « à exister » et « cherchait une tribune »,

– il lui fut même reproché de se défendre lui-même et de ne pas laisser la parole à ses avocats alors que « les débats auraient pu y gagner en qualité ».

Au prétexte de définir la « quérulence » prétendue de notre Confrère, le procureur-bourreau, moderne et cultivé, brandit une définition Wikipedia « trouvée sur Internet ». Ainsi les mots « malade » et « psychiatrie » furent-ils prononcés et associés à notre Confrère Bitton.

Dans le public révolté, les mots « indigne » et « honteux » ont simultanément fusé.

Confondre le sens médical du mot et son sens figuré était la façon hypocrite de traiter notre Confrère Bitton d’agent pathogène et surtout contagieux (définitions du Robert ou du Larousse).

Mais même publiquement contestées, les certitudes de l’avocat-bourreau ne se sont pas écroulées et le moment était venu de la fausse compassion venimeuse.

Notre Confrère Bitton a du  » talent « , serait « attachant » s’il ne  » forçait (pas) son talent », s’il ne  » cherchait (pas) à exister « , pauvre petit ver de terre, s’il n’avait pas commis le  » péché d’orgueil  » (trois fois, le péché fut cité !) de s’en prendre à des « associés » de grand cabinets d’affaires anglo-saxons ou même à une ministre, bref s’il était resté dans le rang.

Puis ce fut l’attaque bassement personnelle : à minuit au lieu d’écrire des emails, notre Confrère Bitton aurait dû « s’occuper de sa petite famille ».

Le public réagit encore, haut et fort : tout cela était odieux.

Enfin l’avocat-procureur-bourreau-donneur de leçons de dignité, de modération, de délicatesse et de loyauté, candidat au droit de requérir contre un de ses jeunes Confrères, demanda une sanction exemplaire : six mois d’interdiction d’exercice de la profession, avec sursis, et dix ans d’interdiction de siéger au Conseil de l’Ordre, au Conseil National des Barreaux et d’occuper les fonctions de Bâtonnier, sans sursis – non mais des fois.

Les avocats-juges n’ont pas bronché. Ne rien dire, c’est leur rôle.

Mais le public avait déjà compris que la dignité n’était pas là où elle prétendait se trouver.

Quoi qu’il en soit, impossible ce jour-là pour notre Confrère Bitton de répondre : un des avocats-juges devait lever le camp et l’affaire fut renvoyée au 5 novembre.

Néanmoins, notre Confrère cumulant les combats et les poursuites, un autre dossier le concernant devait être examiné ce matin-là et l’avocat-juge indisponible fut remplacé par un autre avocat-juge, un autre spécialiste en droit immobilier – une fatalité ….

Le public découvrit alors que l’avocat-juge, qui n’était présent ni à la première audience du 24 septembre ni au début des débats du jour, serait aussi l’avocat-juge-rapporteur.

Cela commença mal : l’avocat-juge-rapporteur affirma avec force qu’il était libre et que « personne », mais vraiment « personne », ne lui avait demandé de dire ou de faire quoi que ce soit. Que cela n’aille pas sans dire était inquiétant.

Brusquement surgissait le fantôme de celle que seul notre Confrère Bitton avait osé nommer.

L’avocat-juge-rapporteur n’omit pas de souligner qu’il ne connaissait rien à la matière dont il s’agissait sur le fond (le droit social, évidemment, cela n’a pas la dignité du droit immobilier). On découvrirait qu’il ne connaissait rien du dossier du tout.

Quoi qu’il en soit, outrepassant ses attributions et se donnant lui-même en exemple,  l’avocat-juge-rapporteur se mua immédiatement en rapporteur-bourreau et en passa directement à la mise à mort :  » J’ai l’habitude de dire à mes clients que leur intérêt passe avant le mien. Or vous, Monsieur Bitton, vous avez fait passer votre intérêt avant celui de votre client. « .

Répertorié (avec quelques centaines d’autres Confrères) sur un site dont l’appellation serait de mauvais aloi, notre Confrère Bitton était d’office un avocat marron. Parce qu’il consentait des délais de paiement à sa cliente en lui demandant, en contrepartie, la remise de plusieurs règlements fractionnés par chèques, « il aurait pu être complice d’escroquerie dans les années 70 » (sic).

Ainsi donc en se télétransportant dans le temps, notre Confrère Bitton était un quasi-délinquant ?

« Et combien d’autres Confrères font comme lui ? » ont dû immédiatement se demander tous ceux qui étaient présents.

Notre Confrère Jean-Luc Tissot, avocat de notre Confrère, ne manqua pas de dénoncer l’irrégularité du « rapport », rappelant les dispositions de l’article 785 du Code de Procédure Civile interdisant au rapporteur de faire connaître son avis.

Mais au-delà du respect des textes, où était le respect minimal dû au mis en cause ? Où était la neutralité garante de la sérénité des débats ? 

Pas une seule fois le mot « courage » n’aura été prononcé. Pas plus que le mot « confraternité ».

Les propos du représentant du Bâtonnier, autorité de poursuite, ont été indignes le 15 octobre 2013 de 9 heures à 13 heures dans les locaux du Conseil de l’Ordre des Avocats à la Cour d’Appel de Paris.

Contestons sa légitimité pour nous donner des leçons de dignité, de loyauté, de délicatesse et de modération.

Soyons présents très nombreux le 5 novembre 2013, de 9 heures à 13 heures, pour soutenir notre Confrère Bitton.

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