Faux associés-vrais collaborateurs de cabinets internationaux, ou la supercherie du statut de ‘Partner’.

Le MAC affectionne les soirées déguisées, avec leurs loups, leurs plumes et autres accessoires. 

Mais il respecte une certaine morale des affaires et il n’apprécie guère qu’on trompe le client sur la marchandise. 

Surtout quand la supercherie sert à flouer aussi les collaborateurs et les concurrents. 

Vous pensiez, comme nous, que lorsqu’une firme présentait publiquement tel avocat comme ‘Partner’ (‘Associé’ en français), il ne pouvait pas s’agir d’un simple collaborateur. 

Et pourtant ….  

Aussi incroyable que cela puisse paraître, plusieurs cabinets internationaux présentent publiquement certains de leurs avocats comme des ‘Partners’, alors que ceux-ci n’ont aucun attribut de l’associé : aucune part sociale, aucun droit de vote, aucun intéressement aux profits et aux pertes.  

En revanche, ces ‘Partners’ sont bel et bien liés à leur firme par un contrat de collaboration et perçoivent une rétrocession fixe. 

Cas pratique 

Commençons par un exemple : MAYER BROWN

Sur le site de la firme, on trouve une liste de 24 ‘Partners’ :

http://www.mayerbrown.com/people/List.aspx?Levels=d043b45a-8f51-445e-adde-02267c44c502&Offices=1c2552a3-2beb-40af-8f81-ba3701b31976 

Pourtant, sur le site de l’annuaire du Barreau, le cabinet ne compte que 9 ‘Associés’, tandis que la quinzaine d’autres prétendus ‘Partners’ se retrouvent au rang de simples ‘collaborateurs’: 

http://www.avocatparis.org/annuaire-barreau-paris.html [taper Mayer Brown]

Rappelons que l’annuaire du Barreau est rigoureusement tenu par le Service de l’Exercice Professionnel de l’Ordre, qui reçoit les nominations d’associés, les contrats de collaborations, ainsi que les notifications de leurs ruptures, et met à jour cet annuaire dans les 24 heures.
  

Les avocats collaborateurs floués  

Nous connaissons tous les conditions de travail des collaborateurs de cabinets internationaux : horaires excessifs, pression sur la facturation, absence de clientèle personnelle, ruptures brutales, …. 

Nous savons aussi qu’ils doivent attendre au moins 8 à 10 années avant de pouvoir espérer devenir, peut-être, ‘Partners’ au sein de la firme. 

Et cette politique impitoyable de « Up or out » : soit on grimpe, soit on saute !   

Tout ça pour quoi ? Pour finir sous-associé, voire faux associé ! [NDLR : vas-y, laisse Bitton !] 

Ce statut de faux-associé permet souvent de masquer les discriminations faites aux femmes. 

La firme met ainsi ses femmes ‘Partners’ en avant, lors de recrutements pour convaincre un candidat, ou dans des appels d’offres pour décrocher un marché. 

La tartufferie est criante dans le cas de MAYER BROWN. 

A en croire leur site, il y aurait 4 femmes parmi les 24 associés du cabinet. 

Or, ces mêmes ‘associées’ sont enregistrées auprès de l’Ordre comme collaboratrices et les vrais associés sont tous des hommes ! 

Le masque est tombé ! 

Allez, pour la peine, le MAC fait entrer MAYER BROWN dans la course pour le Prix Germinal – démasquée mais qualifiée ! 

Les entreprises clientes trompées, les cabinets concurrents lésés.  

Les entreprises clientes croient traiter avec une firme d’envergure, qui présente sur son site et ses plaquettes des dizaines de ‘Partners’. 

Les directeurs juridiques pensent avoir comme interlocuteur un ‘Associé’, autrement dit quelqu’un qui a fait ses preuves et qui a intérêt à ce que le ‘deal’ se fasse au mieux, puisque cet ‘associé’ est supposé être intéressé aux profits et pertes. 

C’est sur cette croyance que le client désigne la firme au lieu de choisir la SCP Lefranc, Piozzi, Benchétrit et De la Moustardière, cabinet d’affaires français qui compte autant d’avocats que la firme mais qui a l’honnêteté d’avouer qu’il ne comporte que quatre associés – des vrais ceux-là.    

Le MAC a une pensée émue pour ces braves cabinets de droit français, constitués sous forme de SCP, AARPI, Associations, SELAFA, SELARL et autres.

Mais que fait l’Ordre des Avocats ?  

La pratique des faux-associés va évidemment contre toutes les règles visant à protéger le justiciable : prohibition de la publicité mensongère, interdiction de créer l’illusion d’une structure d’exercice (art. 45, Règlement intérieur du Barreau de Paris), …. 

Elle viole allègrement les principes de loyauté et de délicatesse vis-à-vis de ces centaines d’avocats collaborateurs, auxquels ces firmes font miroiter une association qui se révèlera chimérique. 

Pourtant, chaque semaine, le Conseil de l’Ordre de Paris vote le procès-verbal des structures d’exercice, qui entérine ces ‘Partnerships’ [NDLR : le Président du MAC s’abstient]. 

Et pour cause : les Secrétaires et Membres de la Commission de l’Exercice Professionnel, celle qui prépare et fait voter par le Conseil ces procès-verbaux, sont quasi-systématiquement des élus de l’Union des Jeunes Avocats (UJA) et des grands cabinets. 

Quand on sait les alliances électorales que l’UJA passe avec les grands cabinets, on comprend que les élus de l’UJA n’aillent pas embêter les copains sur ces points de détail …. Allons, un peu de savoir-vivre ! 

Le Président du MAC, en sa qualité de Membre du Conseil, a posé le débat lors de la séance du Conseil de l’Ordre du 11 septembre 2012.  

Ce fut spectaculaire : il y eu une véritable levée de boucliers des élus de l’UJA et des grands cabinets [NDLR : normal, certains sont eux-mêmes de faux associés]. 

Certes, en droit anglais des sociétés, on appelle cela des ‘Non-Equity Partners’, autrement dit des associés qui n’ont pas de parts en capital. 

Cependant, le droit français – qui a encore vocation à s’appliquer sur le territoire national – ne connait pas ces ‘associés’ qui n’ont pas de parts, ni droit de vote, ni intéressement aux profits et pertes. Ils ne peuvent même pas être comparés aux associés en industrie.  

Le Président du MAC a proposé au Bâtonnier de faire un rapport sur le statut réel de ces ‘non-equity partners’ et une Commission ad hoc sera prochainement constituée. 

Le MAC vous tiendra dûment informés – vous pouvez compter sur nous.

.

Comments are closed.